REMAPATH

Complications neurologiques au cours du VIH dans trois services de médecines au CHU du Point G

Djibril SY1, Adama Seydou SISSSOKO2,DjenebouTRAORE1,Thomas COULIBALY2, Ines NZOUEKEU1, Kaly KEÏTA1, Cynthia SENDJONG1, Seydou SY3, Mamadou CISSOKO 1,Romuald NYANKE1, Aoua DIARRA 1,Sekou LANDOURE 1, Nouhoum KONE 1, Moussa SANGARE1, Nagou TOLO 4, Boua Daoud CAMARA5, AbdramaneTRAORE4,Stéphane L DJEUGOUE1.,Adama SINAYOKO1, Samba CAMARA1, Boa A TREVIS1, Kaya Assetou SOUKHO1.

1:Département de médecine interne CHU du Point G Bamako – Mali, v. Service de Neurologie CHU du Point G Bamako-Mali, 3: Service de Néphrologie CHU du Point G Bamako-Mali, 4: Service de médecine CHU de Kati, 5: Service de médecine Hôpital Namakoro Fomba de Ségou.

Résumé (Français):

Les manifestations neurologiques sont fréquentes à tous les stades de l’infection VIH. Elles sont une cause fréquente de morbi-mortalité. Ces manifestations occupent le 3ème rang des affections opportunistes du VIH et sont la 3ème cause de décès en Afrique. L’objectif était d’étudier les aspects épidémio-cliniques et étiologiques des manifestations neurologiques au cours du VIH.

Il s’agissait d’une étude prospective, descriptive et analytique du 15 juin au 31 décembre 2020 soit six (6) mois. Ont été inclus les patients VIH positifs présentant une ou des complications liées au VIH durant l’étude et hospitalisés dans les services de Neurologie, de Maladies Infectieuses et Tropicales et de Médecine Interne du CHU du Point G.

Sur un total 154 patients VIH, les complications neurologiques ont été observées chez 54 patients soit une fréquence hospitalière de 35,1%, le sex-ratio est de 1,08; l’âge moyen était de 43,7±11,39 ans ; 72,2% des patients résidaient en zone urbaine. Le motif d’hospitalisation était le déficit moteur dans 24,1%. Les manifestations neurologiques ont révélé l’infection à VIH dans 33,3% des cas. En plus de la clinique, les moyens diagnostiques reposaient sur la biologie et l’imagerie ; dans 79,6% des cas les patients avaient un taux de CD4 <200/ mm³, une charge virale détectable dans 92,6%, et le VIH type 1 a été retrouvé dans 92,6%. Les complications étaient toxoplasmose 59,3%, la tuberculose et neuro-méningée et la cryptococcose neuro-méningée associée à la toxoplasmose 3,7% chacune.

Conclusion : Les complications neurologiques liées au VIH sont fréquentes dans les services de Neurologie, de Maladies Infectieuses et Tropicales et de Médecine Interne du CHU du Point G. Elles sont constituées principalement par la toxoplasmose, suivie de tuberculose et  de cryptococcose neuro-méningée.

Mots clés: Manifestations neurologiques, VIH, Médecine interne, CHU Point G
Summary (English):

At all stages of HIV infection, neurological manifestations are frequent. They are a common cause of morbidity and mortality and rank 3rd among opportunistic HIV infections. In Africa, they are the 3rd cause of death in Africa. Here, we studied the epidemiological, clinical and etiological aspects of neurological manifestations occurring HIV.

It was a prospective, descriptive, and analytical study from June 15 to December 31, 2020, i.e. six (6) months. We included all patients’ positives for HIV presenting one or more complications related to HIV during the study and hospitalized in the Neurology, Infectious and Tropical Diseases and Internal Medicine departments of the Point G University Hospital.

Out of a total of 154 patients positives for HIV, neurological complications were observed in 54 patients, ie a hospital frequency of 35.1%, the sex ratio is 1.08. The mean age was 43.7 ± 11.39 years; 72.2% of patients resided in urban areas. The reason for hospitalization was motor deficit in 24.1%. Neurological manifestations revealed HIV infection in 33.3% of cases. In addition to the clinic, diagnostic tools relied on biology and imaging; in 79.6% of cases the patients had a CD4 count <200 / mm³, a detectable viral load in 92.6%, and type 1 HIV was found in 92.6%. Complications were toxoplasmosis 59.3%, tuberculosis and neuro-meningeal, and cryptococcosis neuro-meningeal associated with toxoplasmosis 3.7% each.

Conclusion: Neurological complications linked to HIV are frequent in the Neurology, Infectious and Tropical Diseases and Internal Medicine departments of the CHU du Point G. They consist mainly of toxoplasmosis, followed by tuberculosis and neuromeningeal cryptococcosis.

Keywords: Neurological manifestations, HIV, Internal medicine, CHU Point G
Adresse de correspondance:

M. Djibril SY, Department of internal medicine CHU du Point G.BP: 333. Téléphone:(+223) 79315518 - (+223)65035458. Email: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Introduction

L’infection à VIH est une pathologie immunodépressive favorisant l’installation des affections opportunistes, parmi lesquelles les manifestations neurologiques qui occupent le 3ème rang [1] et sont la 3ème cause de décès en Afrique [2]. Leur spectre est large et surviennent à tous les stades de l’infection. Bien qu’il y ait des succès des thérapies permettant le contrôle de l’infection, de nombreuses complications liées au VIH restent graves [3], en occurrence celles neurologiques, qui posent un problème de diagnostic dans notre contexte et demeurent une cause majeure de décès [4].

Matériel et méthode

Notre étude a été menée dans trois (3) services du CHU du Point G (Maladies infectieuses et tropicales, Médecine Interne et Neurologie). Il s’agissait d’une étude descriptive, avec recueil des données en prospectif, qui s’est déroulée du 15 Juin au 31 Décembre 2020.L’étude a porté sur les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) hospitalisés dans les 3 services durant la période d’étude ; ont été inclus les PVVIH présentant les manifestations neurologiques. La collecte des données a été faite à l’aide d’une fiche d’enquête individuelle préétablie nécessitant des informations relatives aux objectifs de l’étude. L’interrogatoire permettait de Recueillir les informations sur l’identité du malade, de préciser les antécédents personnels, la prise médicamenteuse, les modalités et délai de survenue des manifestations neurologiques. L’examen physique reposait sur la recherche des signes moteurs et sensitifs, et les bilans étaient centrés sur la sérologie, le typage du VIH, le taux de CD4 et plus ou moins scanner. La saisie et l’analyse des données ont été faites sur le logiciel d’IBM SPSS statistics 22.0 et le traitement de texte et de graphiques ont été réalisés à partir des logiciels de la suite d’Office de Microsoft 2016 : Word et Excel. Le test exact de FISHER a été utilisé pour la recherche d’une corrélation entre variables qualitatives, significative si p≤ 0,05.

Résultats

Le total des patients inclus dans notre étude du 15 juin au 31 décembre, était de 54, présentant les manifestations neurologiques sur les 154 PVVIH, soit une fréquence de 35,06%. La tranche d’âge de [35-44] ans était représentée avec 29,6% pour un âge moyen de 43,7 ans. Le sexe masculin représentait 51,9% avec un sex-ratio de 1,08. Les troubles de la conscience représentaient 40,8% des motifs d’hospitalisation, suivi du déficit moteur avec 29,7% (Figure 1)

Le statut VIH était révélé par les manifestations neurologiques chez 33, 3%. La toxoplasmose était diagnostiquée chez 64,9 % des patients (Figure 2).

79,6% des patients avaient un taux de CD4< 200 et une charge virale détectable dans 92,6% des cas. Le décès était survenu dans 59, 3%   et une durée d’hospitalisation de 4 semaines dans 29,6%.

Discussion

Lors de l’étude, nous avons été soumis à de nombreuses difficultés notamment la difficulté à réaliser certains bilans soit à cause de l’état du patient, soit un problème financier soit un défaut du plateau technique. Nous avons recensé 54 patients répondant aux critères d’inclusion sur les 154 patients VIH+ hospitalisés, ce qui représente une fréquence de 35,1%. Ce résultat est proche de celui d’Adoukonou soit 38,1% [5] mais diffère de celui de Millogo et El Fane qui ont respectivement 14.7et 11% des patients infectées par le VIH [1, 6]. Cette différence pourrait s’expliquer par le fait que plusieurs services ont été des centres de recrutement, mais aussi, la courte durée d’étude ; L’infection à VIH était révélée par les manifestations neurologiques chez 33.33 % de nos patients (18/54) ; Ouédraogo avait retrouvé 42,3% et Koné N. 46,51 % [2, 7]. Notre résultat se rapproche de celui de la littérature qui révèle que dans 40-75% des cas, les manifestations neurologiques surviennent au cours de la phase VIH et dans 10% elles inaugurent l’infection [8], nous pouvons donc constater que la majorité des patients arrivent en hospitalisation dans un stade avancé d’immunodépression. La tranche d’âge de 35 à 44 ans était la plus représentée avec 29,6%, ce résultat similaire à celui de Koné N qui avait majoritairement (44,19%) la même tranche d’âge [7]. Nous avons trouvé un sex-ratio de 1,08, résultat similaire à celui de : EL Fane M. qui a retrouvé au Maroc en 2018 une prédominance masculine avec un sex-ratio de 1,27 [6]. L’altération de la conscience a représenté 40,8 % des motifs d’hospitalisation suivi par le déficit moteur dans 29,7 %des cas. Résultat similaire à celui Ouédraogo K. qui a trouvé 38,46 % de troubles de la conscience), déficit moteur 23,07 %. Le diagnostic de toxoplasmose a été retenu dans 64,9 %, comparable à celui de Apetse [3] au Togo 2015 qui a trouvé 54%et Ouédraogo46,15% au Maroc en 2020 [3].Contrairement à notre étude, EL Fane M. a eu 30 % de toxoplasmose précédé de la méningite tuberculeuse, en 2018 au Maroc [6].Cette différence pourrait s’expliquer par un diagnostic tardif lié soit à une consultation tardive et ou au déni de la maladie dans notre population Ouest-africaine empêchant ou retardant le traitement préventif. Le VIH de type 1 était le seul type retrouvé dans notre étude avec 92,6% des cas. Ce résultat concorde avec les données de la littérature et est comparable à ceux trouvé par : Koné N. et Koné Y. respectivement 95,35 % et 83,3% [7, 9].Le taux de CD4 variait entre 2 et 467 avec une moyenne de 95,02 ± 10,25 cellules/mm3, les patients avec un taux de CD4 inférieur à 200/µL représentaient 79,6 % de nos cas ; par contre le taux de CD4 a été inférieur à 200 éléments/mm3 dans 41,86 % des cas avec une moyenne de 299,92±272,34 au cours de l’étude de Koné N. [7].Cette différence pourrait s’expliquer par le fait que les atteintes du SNC au cours du VIH se manifestent plus lors d’une immunodépression profonde que les atteintes périphériques (manifestations les plus fréquentes dans son étude).La durée d’hospitalisation de4 semaines était la plus représentée avec 29,6 % pour une moyenne de 27,2 ± 14,8 jours, différente de celle de Balogou [4] au Togo en 2007 qui a retrouvé 13,.9 jours, cette différence serait due au progrès des thérapies, mais aussi à la petite taille de notre échantillon. L’évolution a été peu favorable chez la majorité de nos patients marquée par un décès dans 59,3% de cas, dans 39% pour El Fane M., et 41% pour Apetse. Par contre la mortalité était faible chez Ouédraogo et Balogou soit respectivement 19,2 et 28,2% [3, 4]. Il existe ainsi probablement une corrélation entre la survenue de manifestations neurologiques et la mortalité.

Conclusion 

L’étude réalisée sur les complications neurologiques au cours du VIH chez les PVVIH hospitalisés a retrouvé une fréquence de 35.1%. Les manifestations neurologiques ont révélé l’infection à VIH dans 33,3% des cas. La tranche d’âge de 35-44 ans était la plus représentée soit 29,6%.  Les troubles de la conscience et déficit moteur ont été les motifs d’hospitalisation les plus fréquents, et la toxoplasmose a été le diagnostic le plus retenu. /.

Conflit d’Intérêt : Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêt.

Références:

1- Millogo A, Ki-Zerbo GA, Sawadogo AB, Ouedraogo I, Yameogo A, Tamini M, et al. Manifestations neurologiques associées à l’infection par le VIH au Centre Hospitalier de Bobo-Dioulasso (Burkina Faso). Bull SocPathol Exot.1999; 92:23‑6.

2 - Ouedraogo K. Les manifestations neurologiques chez les patients vivant avec le VIH au CHU Ibn Sina de Rabat. These, Med, Rabat 2020; N°61.

3 - Apetse K, Niobe D, Kombate D, Kumako V,Guinhouya KM, Assogba K et al. Opportunists du VIH/SIDA en milieu hospitalier neurologique au TOGO. African Journal of Neurological Sciences 2015, vol 33 Nº2, p: 36.

4 - Balogou AAK, Volley KA, Belo M, Amouzou MK, Apetse K, Kombate D, Grunitzky EK. Mortalité des patients VIH positifs dans le service de neurologie du CHU Campus de Lomé Togo. AJNS 2007;26:27-32.

5 - Adoukonou T, Dassi-Gbenou J, Glele RA, Dovonou A, Kpangon A, Houinato D. Épidémiologie des affections neurologiques dans une population de personnes vivant avec le VIH à Parakou en 2014. RevNeurol (Paris) 2015; 171 : A136.

6 - El Fane M, Sodqi  M, Lamdini H, Marih L, OuladLahsen A, Chakib A,  Marhoum K, El Filali. Manifestations neurologiques centrales chez les patients infectés par le VIH dans le service des maladies infectieuses du CHU de Casablanca, Maroc. Bull. Soc. Pathol. Exot. 2018; 111:24-30

7 - Kone N. Epidémiologie et étiologies des manifestations neurologiques au cours de l’infection à VIH dans le service de médecine interne du CHU du Point-G. These, Med, Bamako ; 2018.

8 - De Broucker T. Atteintes neurologiques au cours de l’infection par le VIH chez l’adulte. Lettre Neurol. 2010 ; 14(10) : 8.

9 - Koné Y. Évaluation des manifestations neurologiques au cours du traitement antiretroviral au centre hospitalier universitaire du Point-G. These,Med,Univ de Bamako-FMPOS.2007;n 06.

Illustration 1: 6-4-1
Illustration 2: 6-4-2
Citer l'article: SY D, SISSSOKO AS,TRAORE D, COULIBALY T,NZOUEKEU I, et al. Complications neurologiques au cours du VIH dans trois services de médecines au CHU du Point G. Remapath 2022;6 :17-20.
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Classé dans : REMAPATH N°6